Le voyage en grande Garabagne de Henri Michaux figure dans le « Petit inventaire des grandes rencontres », in Vivre en survivant p.145. Il est pour notre facilité à toutes et à tous repris dans L'inventaire sur le site d'Alban Sanz. Bien sûr, il s'agit d'un roman. H. Michaux est cependant aussi un poète et sait l'être dans tous ses textes.

« Quand, pendant la guerre, je balbutiais mes premiers écrits, c'est sans doute la lecture enchantée de Monsieur Plume et autres textes brefs de Michaux qui m'incita à écrire des contes et des poèmes en prose plutôt que des romans. » J. Sternberg in DDIR, 361.

Je ne veux pas être lourd, ni en rajouter, mais vous avez bien lu: voilà J. Sternberg qui admet au détour d'une notice de créateur qu'il a écrit des poèmes en prose. Décidément, cette plume me surprendra toujours !
De Beckett, il dit aussi qu'il « est avec Michaux, l'écrivain le plus distant de Paris: il n'a jamais paru à la télévision et ne donna pas d'interviews. Bref un homme qui vit en accord avec son oeuvre. » (DDIR 272)

D'un certain Plume (1930), j'extrais ceci  de L'espace du dedans: pages choisies (1927-1959), NRF Gallimard, Point Poésie n° 319, 2008, p. 103

SUR LE CHEMIN DE LA MORT

Sur le chemin de la Mort,
ma mère rencontra une grandebanquise;
Elle voulut parler,
Il était déjà tard,
Une grande banquise d'ouate.

Elle nous regarda, mon frère et moi,
Et puis elle pleura.

Nous lui dîmes - mensonge vraiment absurde -
que nous comprenions bien.
Elle eut alors ce si gracieux sourire de toute jeune fille,
Qui était vraiment elle,
Un si joli sourire, presque espiègle;
Ensuite, elle fut prise dans l'Opaque.

La thématique est commune à Michaux et Sternberg. De plus, ce poème est une illustration de « son style à la fois neutre, cliqinique, et pourtant imagé, fantasmagorique » (DDIR, 361) qui plaisait tant à J Sternberg.

Dans les citations au centre du Dictionnaire des idées revues, deux aphorismes de Michaux sont repris:
- Quand les autos penseront, les Rolls-Royce seront plus angoissées que les taxis. (240)
- La foi, semelle inusable pour qui n'avance pas. (246)