« L'esprit immergé
Dans la pensée intérieure,
Le souffle régulier,
Le corps frissonnant de joie,
Les yeux remplis de larmes de béatitude,

Celui qui est maître de soi
Éprouve les délices
D'être plongé
Dans un océan d'Ambroisie,

Il a vu
Que tu es la Réalité suprême. » [p. 65]


J'adooore la page de gauche en langue originale et la page de droite en français, pour enrichir mon vocabulaire sanskrit...

Et, comme vous l'allez pouvoir apprécier dans l'adresse « AU LECTEUR », le traducteur se libère d'une supposée nécessité de fidélité à l'original:
« Cette traduction n'est pas une libre traduction du sanskrit. [Me voilà rassuré déjà.] C'est plutôt une tentative de puiser, dans le fonds incantatoire de notre langue, les ressources aptes à communiquer une saveur qui, bien sûr [Bien sûr !], est la substance du sanskrit, et qu'aucune langue ne saurait matériellement orchestrer de la même manière.
Il existe un moment où la chimère d'une traduction "fidèle" doit cesser d'être une Arlésienne mythique. »


« Je ne conçois pas de poésie sans un miracle d'humilité à la base. »
René-Guy Cadou


Là où la connaissance du traducteur savoureux prend toute sa mesure encyclopédique, c'est dans l'explication, le décodage qu'il offre en fin de volume. Là, chapeau bas, en toute ... discrétion. Ces commentaires sont une aide précieuse pour pénétrer dans l'univers si codé du shivaïsme du Cachemire.

Pour ce texte-ci (l'ensemble est un hymne du Xe siècle), cela donne:
« Shiva est vu comme l'ascète parfait, le Grand Yoga. À l'accomplissement des rites qui touchent la pratique temporelle succède, pour les dépasser, le pouvoir de réintégration du yoga. C'est la voie la plus ardue, la plus instransigeante.
Expérience qui met en jeu l'énergie vitale de l'homme: mâitrise semée de dangers et de tentations. Nous connaissons la dilapidation spontanée de nos forces, la faim naturelle de nos sens. Il s'agit ici d'en capter la puissance, de la contrôler, de la canaliser, et sans un seul faux pas. Un seul écart serait proprement fatal, irrémédiable.
Le but n'est-il pas de ne plus offrir aucune prise aux sollicitations de la nature?
Voie verticale, paroi lisse.
La Kundalini, l'énergie vitale, perce les cinq centres vitaux qui correspondent aux cinq sens. Au-delà est la libération, Moksha. »
(« délivrance hors du cercle du samsara» - « désigne le courant sans commencement et sans fin des existences »). [102-103 et Glossaire 111].

Je ne conçois pas de poésie sans un miracle d'humilité à la base.

Bien sûr, cette grande érudition peut être utile, mais le texte seul tient la route même si, après avoir lu le commentaire, il devient clair que la compréhension pouvait être superficielle sans lui. ET si, juste une supposition, cela suffisait. Car la langue du traducteur est belle...