« Même si, comme j'en formule plutôt l'hypothèse,
la conscience se révèle être
plus ou moins la même chose
que l'attention,

les questions à propos des contenus sensoriels
doivent être prises en compte;
mais c'est au mieux pas clair
qu'elles influent grandement
sur des théories de la cognition. »

Jerry FODOR (1935-2017),
en conversation avec Richard MARSHALL
sur 3am magazine.
(sauvegardé le 25 5 22 à 19h sur le site de R. Marshall:
Meaningful words without sense & other revolutions.)

Trad. personnelle


Une des traductions possibles du titre de cet essai dans la langue de Tristram Shandy(Pardon, William, mais celle de Laurence est encore plus jouissive !) est Pay attention to. La langue anglaise insiste sur l'énergie qu'il faut dépenser (= payer, consacrer), qu'il faut consacrer pour obtenir ce que D. Rinpoché définit comme « l'expérience naturelle de l'instant présent qui consiste à ne pas être possédé par son agitation ».

À la longue, l'attention s'installe puis s'intègre à la matrice des jours. Moins d'objets s'égarent. Les actions s'organisent mieux dans l'espace & dans la durée. Daniel Odier en parle dans Tantra. Éric Baret & la terminologie que j'ai extrait d'un de ses ouvrages l'approfondit. Elle est un caractère qui s'ajoute à ceux définissant déjà la béatitude, selon M. Juffé & R. Misrahi, grands lecteurs de Spinoza.


Dans ce même essai, un aphorisme s'est dégagé: La nature aime l'humain qui aime la nature.

« L'amour de la nature pour l'humain est la même chose que l'amour de l'humain pour la nature. Il n'y a pas très longtemps (quelques semaines tout au plus) que j'ai pris conscience intuitivement que la nature aime l'humain qui aime la nature. Il y a là une forme de réciprocité silencieuse & authentique. L'arbre qui abrite le corps sous sa frondaison généreuse protège le corps des chaleurs excessives que notre climat déréglé par la suractivité humaine offre en réponse à nos excès. & si il suffisait de la laisser croitre à sa guise ? »


En partant de cet aphorisme, une réflexion se prolonge: l'humain peut s'entrainer à mieux faire attention

  • à l'instant présent,
  • aussi bien à la vie qui bat en lui
  • qu'à la vie en général, celle qui innerve la nature, dont il fait partie évidemment & en y prenant trop de place grâce aux technologies qui détruisent la vie même en ayant l'impression d'augmenter son confort. L'humain a tellement exagéré dans cette surenchère qu'il en paie les pots cassés !

Les manières de faire attention permet à l'attention portée à soi de rencontrer l'attention que le soi porte à la nature, ainsi que, de mieux en mieux perçue, l'attention que la nature porte au soi.


Porter attention à, c'est manifester à l'autre qu'il ou elle importe à nos yeux, dans l'instant même où l'attention se porte. La réciprocité attentive n'est possible que si les deux ont développé cette faculté d'attention.

La nature porte probablement en tous temps attention à l'humain, et bien sûr au vivant, à tout le vivant, dont elle est la manifestation infinie. Elle a ça en elle, comme « entité englobante ».

L'humain, lui, doit patiemment développer cette faculté en lui pour, un jour, peut-être, prendre conscience que la nature est présente & simplement attentive par la densité de sa présence au monde à sa propre existence. Nombreux sont les humains qui n'y parviendront jamais...


Le contraire de l'attention que l'on porte est cette distraction, cette dispersion qui fait que l'humain est « possédé par son agitation », et donc n'est plus maitre de son activité, voire, pire, de soi. Les manifestations parfois extrêmes de cette agitation, un stress assurément, sont multiples. Notre monde en est si gravement atteint qu'il en meurt par auto-dissolution. La langue anglaise a, comme souvent, une expression ramassée pour ça: terminally ill (malade en phase terminale).


Quand un humain dit à un autre « fais attention ! », il attire son attention

  • sur l'inattention constatée face à un danger,
  • ou sur une parole que le locuteur va prononcer: « Fais bien attention à toi ! », exprimant une violence larvée qui lui pend au nez s'il n'obéit pas.

Polysémie, quand tu nous tient !


Cette faculté paraît bien être centrale à ce que J F Billeter nomme le désir de progresser & de s'accomplir comme raison de vivre dans la joie, qui est puissance d'agir. Elle fait partie de cette puissance d'agir.


Cheminement conceptuel proposé à travers proses essayées & poésies tentées si vous souhaitez continuer à réfléchir en ma compagnie:

Porter attention à / L’intuition / Lilian Silburn: la kundalinî / La béatitude, késaco ? / Humains trop humains / Art poétique, avait-il dit / Le méditatif & le pensif / Complexité, éveil aux matrices du monde / Ariel Suhamy communique le bien chez Spinoza / L'agir & le subi / Spinoza, méthodes pour exister / L'amour intellectuel de la nature en ce jardin paresseux

 

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Aphorisme, comme ça...

« La retraite est une chose merveilleuse,
qui libère de terribles puissances.
& elle donne au silence de grandes douceurs. »
Gilles Deleuze, dans une lettre adressée à Arnaud Villani,
publiée dans L'abeille & l'orchidée, p. 149.

 

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