caroline boidé fauvisme collioure kahlo histoire d'OCaroline Boidé sait insuffler à sa prose un élan puissant qui sied au soleil dont s'inonde la terrasse havrée matinale. Deux chapitres nous promènent à Collioure, le quatrième - La couleur comme absolu - et le cinquième - La bande des fauves - en compagnie de Matisse & Derain. J'ai aimé parcourir les rue du Mouré et de Port d'Avall en compagnie de sa belle plume. Et la dernière phrase du chapitre 4 dit bien la discontinuité indéfiniment suspendue qui est la mienne depuis sept ans : « La vulgarité du tourisme a envahi le charme du village des pêcheurs. » 28

Partout où ses pas la mèneront aux retrouvailles avec d'autre Fauves redira à quelques nuances près, entre effacements sans traces et réminiscences trop diffuses pour ne pas être éloignée du réel ancien réévoqué, le désarroi que notre époque induit. Ses recherches sont sérieuses: elle a par exemple potassé le courrier échangé entre Mme Matisse, Amélie et Jeanne Hauguin. 

La poursuite de l'ouvrage accompagnera Frida Kahlo dont elle dit « sa plus fidèle compagne, le double d'elle-même, celle qui ne lui ferait jamais défaut était la solitude. » 50

Débridée (ch. 7) est un hommage à la femme fauve dont elle dit que son loisir préféré est de rejoindre l'été. Elle en tire un fil littéraire auprès d'exaltées. Cette capacité à décrire l'absolu, quel qu'il soit, appartient en propre à cette belle plume. 

Je suis frappé comme beaucoup de peintres ont excellemment écrit sur leur art. Et il est assez fascinant de constater combien ces textes, ces journaux intimes, ces correspondances se constituent commentaires très autorisés sur leur palette propre.

J'ai souvent arpenté les rivages, à l'instar de Nietzsche qui a pratiqué cet arpentage toute sa vie.

La Boétie fait partie de ces fauves libres dont l'autrice a arpenté l'oeuvre: « l'homme est né libre et partout il est dans les fers. » (ch 15)

« Si le fauve n'avait pas les traits d'une bête, il aurait uniquement besoin

  • de ses livres,
  • de quoi
    • écrire,
    • se nourrir &
    • voyager.

Je vais m'enforester pourrait-il dire, reprenant la belle image des coureurs de bois du Québec. Il irait

  • autant dans la nature
  • que celle-ci emménagerait en lui. » 116

C'est aussi une forme de sentiment océanique, non ? En tout cas, cela n'en est pas fort éloigné. Je m'y retrouve bien.

Redécouvrir ainsi une part enfouie dans un quelque part quelque peu indéterminé, en saisir chaque instant mène à la plus petite sensation de plénitude. La faire sienne lui suffit. Le content en soi la façonne à sa mesure même en échappant « à l'immédiateté dans laquelle l'époque sombre. » 152

« Il ne faudra jamais confondre

  • la vocation clandestine dont se réclame l'autrice d'Histoire d'O et
  • l'oubli pur et simple d'une grande créatrice. » 177 ch 22 Clandestine

Ce livre en quête de traces, de présentiels rappelant l'ancienne présence assidue de personnes aux allants fauves, j'en partage la volonté d'enquête, comme celle - tout aussi décevante que les siennes ! - menée en compagnie de l'architecte Ricciotti, qui a conçu la verrière ajoutée au Musée liégeois du parc de La Boverie, entre Marseille (Le Mucem et son trop vaste écrin de capitale du Sud), Menton (Musée Jean Cocteau), avec arrêt trop prolongé à Bandol, lieu de son atelier d'architecte. Mes pas m'y avaient mené à l'été 2016. Neuf ans déjà.

Au terme de ma lecture, ceci encore: j'ai passé de délicieuses heures à me glisser entre les pages de cet hommage rendu au fauvisme avec lequel je me sais des ancrages, l'un par Collioure, l'autre par la prose absolue Linda Lê (ch 18: Linda Lê ou la vaillance) dont Caroline Boidé fut l'amie. Chaque chapitre, l'ouvrage en compte 24, m'a emmené par la main dans d'autres univers moins familiers, voire même jusque là inconnus. J'y ai glané un contentement serein à force d'y accomplir une pérégrination assidue, sereine et paisible.


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